Lorsque dans un festival on arrive à mi-parcours, le petit jeu consiste inévitablement à faire le point, voire pour les plus audacieux à risquer un pronostic. Tous les matins, je m’amuse à jeter un coup d’oeil sur Screen, une publication professionnelle qui a ici une édition quotidienne et qui demande à un panel international de journalistes de coter les films en compétition (quatre **** représentant le sommet de l’enthousiasme)…
Art & Culture : Cinéma
Secret d’état à la Berlinale
En 2010, des informaticiens de haut niveau ont découvert l’existence d’un programme ultra-secret intitulé Stuxnet, qui a permis de saboter le développement de l’industrie nucléaire iranienne. Dans son film Zero Days, présenté aujourd’hui à la Berlinale, le réalisateur américain Alex Gibney nous présente une enquête fouillée sur cette invention qui semble relever de la science-fiction et qui a pourtant été conçue par les agences (CIA, NSA et autres) de deux pays obsédés par la menace iranienne: les Etats-Unis et Israël.
Les premiers, les derniers
Bouli Lanners incarne Gilou aux côtés de Cochise. Les deux chasseurs de prime errent dans une France inconnue, oubliée. Bouli Lanners réalise et interprète un road-movie très noir… qui vient tout juste de remporter, au Festival International du Film de Berlin, le prix Europa Cinemas Labels et le Prix Oecuménique.
Clap final sur la Berlinale
Une Berlinale très politique. Et même, comme l’écrivait dans son éditorial Der Tagesspiegel (le meilleur des quotidiens locaux), la plus politique de ces dernières années. Dieter Kosslick, le patron du Festival, avait annoncé que celui-ci devait jouer le rôle d’un sismographe et rendre compte des convulsions de notre temps. Mission accomplie.
Vendredi à la Berlinale
« Alors, qu’en pensez-vous ? » : Je sors titubant du Berlinale Palast après les huit heures de projection de A Lullaby to the sorrowful mystery, et comme je suis un des premiers à quitter la salle trois télévisions (espagnole, allemande et italienne) se précipitent successivement sur moi pour recueillir mes impressions. Tout à coup, je me dis que ceux qui en 1876 venaient d’assister à Bayreuth à la première mondiale du Ring wagnérien devaient être dans le même état d’esprit: la stupeur et l’incrédulité.
Le « Belgica » de Felix Van Groeningen
Le café Belgica est au centre de l’histoire de deux frères, unis pour le meilleur et pour le pire. Après La merditude des choses (2009), Alabama Monroe (2012) (César du meilleur film étranger en 2014 et nommé aux Oscars la même année), le cinéaste belge flamand Félix Van Groeningen revient avec un psychodrame prenant, tendre, violent, entièrement tourné à Gand.
Ben Stassen et Robinson Crusoé 100% belge!
Robinson Crusoé en 3D-relief ! Le Belge Ben Stassen, Vincent Kesteloot et l’équipe de nWave Pictures, basée à Forest, livrent une version originale du célèbre naufragé, pleine de surprises. Vendredi devient Mardi, Robinson échoue sur une île pas vraiment déserte…Voilà un film d’animation 3D-relief enchanteur, divertissant où les animaux exotiques et l’unique être humain (Robinson) devront apprendre à vivre ensemble.
L’incroyable vitalité du cinéma asiatique
Il y a bientôt vingt ans que, grâce au conseil d’un ami français, j’ai découvert le Festival d’Udine. Ma passion pour ce rendez-vous du cinéma asiatique ne s’est jamais démentie. Au fil des années, Udine est devenu mon festival favori. Cela tient d’abord à sa place unique dans le paysage cinématographique européen. S’il y a ici et là des manifestations plus modestes dédiées à l’Asie, aucune ne peut rivaliser avec la cité frioulane pour ce qui est de la richesse et de la variété du programme.
De l’humour aux frissons : le cinéma asiatique dans tous ses états
Un film entièrement consacré à de jeunes enfants ? J’avoue qu’à cette idée j’ai gagné la salle de projection du Festival en traînant quelque peu les pieds. Ce genre de sujet incite le plus souvent à la mièvrerie et à une sentimentalité insupportable. En outre, on a pu vérifier maintes fois que s’ils sont livrés à eux-mêmes les interprètes juvéniles versent sans retenue dans le cabotinage. The World of Us (qu’on pourrait traduire par « Notre monde ») a été en fait une excellente surprise qui a suscité un tonnerre d’applaudissements. Premier long métrage de la jeune Coréenne Yoon Ga-eun, le film a pour héroïne une fillette de dix ans qui en début d’année (nous sommes dans une école du nord de Séoul) se lie d’amitié avec une nouvelle camarade du même âge. La réalisatrice décrit avec une étonnante justesse l’évolution de cette relation, qui passe d’un attachement passionné à une rancoeur vengeresse losque la petite Sun se sent délaissée par sa copine. J’ai rarement vu autant de finesse et de subtilité dans l’exploration de la psychologie enfantine. Et les deux fillettes (qui n’avaient jamais joué dans une œuvre de fiction aussi ambitieuse) se révèlent d’un naturel incroyable. Yoon Ga-eun était toute chavirée l’autre soir par l’accueil enthousiaste du public local et de la critique.
Clap final à Udine
“The public is always right”, avait décrété jadis Cecil B. DeMille. Comme je l’ai mentionné précédemment, le Festival d’Udine a donc décidé dès sa création d’appliquer à la lettre la maxime du légendaire producteur hollywoodien. Ce qui compte ici, au Far East Film Festival, c’est l’approbation des spectateurs, qui se traduit à la fin de chaque séance par le dépôt d’un bulletin de vote comportant une gradation de 1à 5. Les résultats de ce plébiscite diffèrent d’ailleurs souvent, comme j’ai pu le constater, du sentiment des critiques et des professionnels…